La prise du mont Kemmel
Du 19 au 24 avril 1918, les troupes allemandes semblent marquer une pause dans leur offensive dans les Flandres. Après leur premier échec face au mont Kemmel, le front redevient relativement calme entre La Bassée et Ypres. Le 24 avril au matin, les armées de Ludendorff passent à l'offensive à Villers-Bretonneux, en face d'Amiens et y lancent un assaut d'une rare violence.
La reprise des combats sur la Somme
Les troupes australiennes présentes dans le petit village picard sont bousculées par l'arrivée des troupes d'assaut allemandes et abandonnent le village le 24 au soir. La route d'Amiens semble à nouveau ouverte et c'est encore une fois sur la Somme que la crise se fait la plus ouverte. Le 25 au matin, les troupes australiennes contre-attaquent, assistées du Tank Corp déjà mis à l'épreuve à Cambrai en novembre 1917. En une journée de combats acharnés, les troupes alliées reprennent le terrain perdu la veille et stabilisent à nouveau le front aux portes d'Amiens.
Première application des accords de Doulens
![]() officiel du 26 avril 1918 publié par Le Figaro. |
Conformément aux accords conclus à Doullens le 26 mars, le commandement général alliés décide de l'expédition de troupes française dans les Flandres pour aider les soldats britanniques bousculés par l'offensive Georgette. Transitant par St Omer le 19 avril, les soldats français se positionnent sur la partie du front située entre Bailleul, désormais au main des allemands, et Spanbroekmolen. C'est une division d'infanterie française entière qui prend position sur les pentes du mont Kemmel, soutenue par d'important moyens en artillerie. Le matin du 25 avril, la relève des troupes britanniques du secteur est quasiment terminée.
C'est justement ce matin là que l'état-major allemand retient pour lancer sa grande offensive sur les monts des Flandres. A 2h30 du matin, plus de 250 batteries d'artillerie pilonnent le village de Kemmel et l'ensemble du mont avec un mélange d'obus au gaz et de charges explosives. D'après certains survivants français des combats, le déluge de feu qui tombe sur les troupes ce matin là est le plus violent de toute la guerre, sans commune mesure avec les débauches d'artillerie de Verdun.
Obusier allemand pendant l'attaque du mont Kemmel en Avril 1918
Collection Australian War Memorial
Kemmel tombe aux mains des allemands
Album photo : Les combats de Kemmel vus côté allemand |
Pendant les 3h30 que vont durer le bombardement, les troupes françaises se positionnent le mieux possible pour recevoir une attaque imminente. N'importe quel abris est utilisé : le peu de fouret qui reste sur le mont, les cratères laissés par les bombardements des jours précédents, les ruines du petit village de Kemmel au pied de la colline. Le troupes française n'ont d'autres choix que de se terrer en attendant un assaut qu'ils savent déjà très dur. L'artillerie français tente bien de répondre au pilonnage allemand, mais elle est également prise pour cible par les bombardements. Sa visibilité est de plus très limitée en ce 25 avril. Agissant depuis l'autre versant du mont Kemmel, elle ne peut réellement compter que sur la reconnaissance aérienne des escadrilles françaises. Reconnaissance d'autant plus ardue que Kemmel est à la pointe de combat, et est très éloigné des premiers aérodrômes du front.
Face à cette division française tout juste remise des combats de Noyon et de Montdidier, ce ne sont pas moins de trois divisions et demi qui montent à l'assaut côté allemand. Pour l'attaque sur les pentes du Kemmel, Ludendorff a mobilisé des troupes d'élite, l'équivalent bavarois des chasseurs alpins. Habitués aux terrains accidentés, ils se lancent à l'assaut du mont dès 6h00 du matin, au milieu des cratères et des décombres laissés par le bombardement du matin. Les combats sont furieux, et se déroulent souvent au corps à corps. Mais les soldats français peuvent difficilement résister à des troupes d'élite plus de trois fois supérieures en nombre : le sommet du mont Kemmel, et son observatoire, tombe au main des allemand peu après 7h10 du matin, soit quasiment une heure après le début de l'assaut. A 10h30, les combats sont presque terminés et l'ensemble du mont est englobé dans les lignes allemandes.
Les derniers combats de la bataille de la Lys
L'état-major allié souhaite la mise en place immédiate d'une contre offensive sur Kemmel, mais les pertes de l'artillerie sont telles que le bombardement préliminaire ne parvient pas à bousculer les troupes bavaroises solidement campées sur le mont. Le 28 avril, ce sont les allemands qui relancent l'offensive face aux français, en tentant un assaut sur le village de Locre et sur le Scherpenberg. Au milleu des bombardements et des nuages de gaz, les troupes allemandes bousculent encore une fois les soldats français mais échouent dans leur assaut de Scherpenberg. La village de Locre change lui plusieurs fois de main au cours de la journée du 28, pour finalement rester en tête des positions françaises. Les troupes allemandes retentent bien un nouvel assaut dans l'après-midi du 28 avril, mais les pertes sont telles qu'aucune véritable percée ne peut être envisagée. Plus au nord toutefois, les anglais reculent et quittent leur position de Voormezele pour tenir une ligne plus sûre et mieux protégée par leurs postes d'artillerie.
Après l'assaut manqué sur Scherpenberg le 28 avril, les combats se calment rapidement dans les Flandres, principalement du fait de l'épuisement des combattants. La ligne de front se stabilise du canal de la Bassée à Ypres et marque un saillant abordant l'orée de la forêt de Nieppe, les côtes de Merris et Meteren et le sommet du mont Kemmel. Le front gardera cette ligne jusqu'au offensives alliés du mois d'août 1918, menant à la vistoire finale. Pour l'heure, au début du mois de mai, Ludendorff prépare sa prochaine offensive de printemps sur l'armée Française. Elle aura pour objectif le Chemin des Dames et les villes de Soisson et Reims.
Ressources
Pierre Miquel - La liberté guidait leurs pas, Tome 2 : La Marne au coeur (Livre de poche - 2007)