L'assaut du 9 avril 1918

La fin progressive des combats sur la Somme, aux portes d'Amiens, début avril 1918, fait redouter aux alliés une nouvelle offensive allemande sur un autre secteur du front. Epuisée par trois semaines de combats acharnés aux environs de Saint-Quentin, l'armée britannique ne pourra que difficilement faire face à un nouvel assaut... Celui-ci arrive pourtant très vite, au nord du front, dans le secteur pourtant calme des Flandres françaises.

Une relève manquée

Le front de la Lys
au 9 avril 1918

Les premiers véritables bombardements sur le front des Flandres débutent le 7 avril 1918 entre Armentières et le canal de La Bassée, sur la partie du front occupée par les soldats portugais. Préoccupé par la faiblesse des troupes portugaises, l'état-major britannique décide de relever celles-ci avec la Durham Light Infantery, troupes anglaises en provenance de la Somme. Depuis l'hiver, la confiance qu'accorde l'état-major anglais aux soldats portugais est des plus faible, au point que dans les plans de Sir Douglas Haig, la ligne de front portugaise s'étendant de Laventie au canal de La Bassée n'est qu'une ligne tampon. La véritable ligne de resistance face à l'ennemi doit s'organiser quelques kilomètres plus loin, sur le rive gauche de la Lawe.

[...] each British Corps would at once, on first sign of attack, throw back and man a defensive flank to the Rivers Lawe and Lys, and the line of these rivers would also be defended by British troops. [...] Providing the British troops held up the enemy's advance on both flanks and in rear of the Portuguese, the situation would tactically and be strategically remain sound. The important positions which must held are Givenchy-Bethune, the line of the rivers Lawe and Lys, Armentières and British troops are responsible for holding them. [1]
Le communiqué officiel
du 9 avril 1918
publié
par Le Figaro.

Les troupes portugaises souffrent en effet de leur isolement et de leur trop longue présence en ligne. Abandonnées politiquement par leur gouvernement depuis la révolution de novembre 1917, les soldats n'ont pas été relevés par l'état-major britannique pendant de longs mois, de peur de voir ceux-ci regagner leur pays à pied en profitant d'une période de repos. La rélève prévue à l'aube du 9 avril 1918 n'aura finalement pas lieue. A 4h30 du matin, les canons allemands rassemblés en toute discretion au cours des nuits précédents, déclenchent l'enfer sur les soldats portugais. L'offensive allemandes dans les Flandres vient de débuter avec l'une des bombardements les plus denses de la guerre.

L'avancée sur la Lys

Après ce bombardement d'une rare violence, l'assaut débute à l'aube en suivant la technique déjà expérimentée dans la Somme. Plutôt que le combat frontal, les troupes allemandes préfèrent contourner et encercler les ilôts de résistance et poursuivre leur avance le plus loin possible avant la nuit. Assomée le jour même de sa rélève, l'armée portugaise n'offre vraisemblabement que peu de résistance aux assaillants, mais participe avec l'armée britannique à la constitution d'une deuxième ligne de front dans l'après-midi, malgré les déclaration de l'Etat-Major allemand :

Les troupes portugaises abonnèrent, pour la plupart, le champ de bataille en une fuite éperdue et laissèrent à leurs alliés le soin de nous combattre. in Maréchal Von Hindenbourg - De ma vie [2]
Prisonniers portugais au premier jour de la bataille de la Lys
Prisonniers portugais au premier jour de la bataille de la Lys
Droits réservés

Ce sont toutefois l'ensemble des troupes alliées qui sont bousculées par la violence de l'attaque allemande. La résistance dans Laventie fait long feu et seules les troupes britanniques protégeant l'accès au canal de La Bassée à Givenchy , sur le sud du front, réussissent à mettre en échec les soldats allemands. Partout ailleurs, entre Armentières et La Bassée, les troupes allemandes avancent rapidement et font de nombreux prisonniers. Le 9 au soir, les Sturmtruppen franchissent la rivière la Lys au niveau du hameau de la Croix-du-Bac et y établissent une sérieuse tête de pont. Le lendemain, la rivière sera franchie en de nombreux endroits et le front sud de la bataille s'étendra de Bois-Grenier à la Lys et d'Estaires aux abords de Vieille-Chappelle, quelques kilomètres plus au sud.

Notes

[1] Citation de Sir Douglas Haig in THE A.I.F. IN FRANCE, histoire officielle de la Force Impériale Australienne pendant la Première Guerre Mondiale.

[2] Le maréchal Von Hindenbourg révisera son opinion en 1924 dans une lettre adressée à l'état-major portugais, dclarant alors : "L'assaut des allemands a rencontré les Portugais dans une position très peu favorable et le progrès de l'attaque a été plutôt dû à cette circonstance, qu'au manque de résistance des troupes. Vues les circonstances difficiles, les troupes, aussi bien les officiers que les soldats, se sont battues avec bravoure."

Ressources

Manuel do Nascimento - La Bataille de la Lys (L'Harmattan - 2008)
Sir Douglas Haig - Sir Douglas Haig's despatches (December 1915-April 1919) (Disponible sur Archive.org - 1919)
The Official History of Australia in the War of 1914–1918 (Disponible sur le site de l'Australian War Memorial - 1920-1941)

Publicité